Matières premières critiques : pour être couronnée de succès, toute stratégie européenne devra associer des partenaires internationaux

Madonna le chantait déjà dans les années 1980 : We are living in a material world. Si nous voulons atteindre nos objectifs ambitieux sur les plans climatique et numérique, il est essentiel de garantir l'accès à ces matières en Europe, et plus particulièrement à ce que l’on appelle les « matières premières critiques » (MPC). Prenons l'exemple du cuivre, qui est utilisé dans toutes les technologies d'énergie propre et souvent aussi pour le câblage électrique. Ou encore le lithium, le nickel et le cobalt, qui sont utilisés pour produire les batteries des véhicules électriques. Par ailleurs, des « terres rares » aux consonances exotiques, telles que le néodyme, sont essentielles pour les aimants permanents que l'on trouve dans les éoliennes, les moteurs des véhicules électriques et les disques durs des ordinateurs.

La demande mondiale de ces produits et d'autres MPC devrait croître rapidement. Du côté de l'offre, l'extraction des MPC est souvent dominée par une poignée de pays et/ou quelques grandes sociétés minières. Le raffinage de nombreuses MPC est encore plus concentré, souvent dans un seul pays, à savoir la Chine. Cette situation présente des risques importants au niveau de la chaîne d'approvisionnement, y compris la possibilité que les MPC soient utilisées comme levier géopolitique.

En réponse, la Commission européenne a récemment proposé une loi sur les matières premières critiques. La loi fixe des valeurs de référence en termes de capacité au niveau de l'UE pour l'extraction, le traitement et le recyclage des MPC d'ici 2030 – des objectifs que l'Europe entend atteindre en sélectionnant des projets stratégiques pour lesquels les procédures de délivrance de permis sont rationalisées et le financement facilité. La faisabilité globale et l'efficacité finale des politiques ambitieuses de l'Europe en matière de MPC restent incertaines. La relocalisation de l'extraction et de la transformation des MPC vers l'Europe serait extrêmement complexe : elle prendrait beaucoup de temps et serait certainement très coûteuse. L’Europe aura beaucoup de mal à trouver la patience et les ressources nécessaires.

Pour être couronnée de succès, toute stratégie européenne en matière de MPC devra être internationale. Conformément au mantra de l'« autonomie stratégique ouverte », l'UE doit rester ouverte et coopérative sans se montrer naïve. L'UE devra assortir les accords de partenariat stratégique conclus avec des pays producteurs de MPC d’importants soutiens financiers, tout en restant sensible à leurs ambitions et préoccupations nationales. Dans la mesure du possible, des synergies devront être recherchées avec d'autres importateurs de MPC partageant la même vision, afin d'assumer ensemble la charge financière que représente l'investissement dans les chaînes d'approvisionnement mondiales de MPC et de fixer des normes communes au niveau de la transparence et sur les plans environnemental et social pour les entreprises liées aux MPC.