Communiqué de presse - WP 276 : Comment les exportateurs réagissent-ils aux variations de la compétitivité-coûts?

La mondialisation et l’intensification de la concurrence internationale dont elle s’accompagne ont fait germer l’idée que les exportations étaient devenues plus sensibles aux coûts. La compétitivité coûts sur le plan international se mesure souvent en termes de coûts de la main d’œuvre par unité produite. Ce mode de calcul repose sur le raisonnement selon lequel toute augmentation des coûts unitaires de la main d’œuvre se transmet par une hausse des prix à l’exportation et est donc nuisible aux exportations. Si l’évolution des coûts unitaires de la main d’œuvre suscite réellement des préoccupations sur le plan des politiques dans plusieurs pays européens, il existe peu d’éléments concluants quant à l’incidence de ces coûts sur les performances à l’exportation. Cette étude vise à évaluer le lien entre cette mesure des coûts unitaires de la main d’œuvre et les performances à l’exportation au niveau de l’entreprise. Les auteurs utilisent en particulier une série de données confidentielles belges au niveau des entreprises contenant des informations détaillées quant aux coûts, à la productivité et aux exportations pour la période comprise entre 1999 et 2010. Adopter une perspective microéconomique fondée sur ces données désagrégées permet de considérer plusieurs dimensions souvent laissées de côté par la littérature existante. Plus précisément, les auteurs étudient non seulement les performances à l’exportation des exportateurs toujours en activité, mais aussi les entrées et les sorties d’entreprises dans le secteur de l’exportation. L’étude tient en outre compte de l’effet hétérogène des coûts unitaires de la main d’œuvre sur les performances à l’exportation en fonction des caractéristiques propres à l’entreprise et au secteur.

L’étude met en évidence une relation négative entre les coûts unitaires de la main d’œuvre et les exportations au niveau de l’entreprise: une augmentation de 10 % des coûts unitaires de la main d’œuvre se traduit par une contraction des exportations de l’ordre de 2 à 4 %. L’étude montre que cette élasticité varie d’un secteur et d’une entreprise à l’autre, et plus particulièrement que les entreprises à forte intensité de main d’œuvre présentent une élasticité plus marquée des exportations vis à vis des coûts unitaires de la main d’œuvre. De plus, les données montrent que des coûts unitaires de la main d’œuvre plus élevés réduisent la probabilité pour les entreprises n’opérant pas à l’exportation de se mettre à exporter et augmentent la probabilité pour les entreprises exportatrices de cesser d’exporter.

L’étude permet d’évaluer l’utilisation des coûts unitaires de la main d’œuvre en tant qu’indicateur de compétitivité. Si les résultats de l’étude montrent que les coûts unitaires de la main d’œuvre influencent effectivement les exportations au niveau de l’entreprise, cet effet est assez restreint, ce qui laisse à penser soit que la répercussion des coûts sur les prix est limitée, soit que la demande de produits exportés est peu élastique. Ce qui précède souligne l’importance tout au moins équivalente d’intégrer aux indicateurs de compétitivité d’autres facteurs, tels que les goûts et la qualité, comme le suggèrent les modèles commerciaux récents axés sur des paramètres de qualité et de goûts. Un défi de taille lorsqu’il s’agit de créer des indicateurs de compétitivité consiste dès lors à déterminer des mesures appropriées de la qualité et des goûts.