Surfons-nous sur les vagues d’un cycle financier mondial dans la zone euro ?

(article pour la Revue économique de septembre)

Dans l'article, il est examiné la question de savoir si les conditions financières domestiques – telles que la croissance du crédit bancaire, les taux d’intérêt, les cours des actions et les prix de l’immobilier – dans les pays de la zone euro sont liées à un cycle financier mondial (CFM). En vue de mesurer cet effet, un indice des conditions financières (ICF) pour les pays de la zone euro, résumant leurs conditions financières domestiques, est construit et comparé à une mesure du cycle financier mondial (reprise de Habib et Venditti, 2019).

Les résultats obtenus contribuent à la littérature, en plein développement, relative au cycle financier mondial, qui analyse principalement l’effet de ce cycle sur les flux de capitaux des économies émergentes. Ils sont complétés par des conclusions quant à l’incidence du CFM sur les conditions financières domestiques dans les pays de la zone euro.

Tout d’abord, un cycle financier évident est observé pour la zone euro, avec des pointes qui peuvent être liées à des événements de crise. Il existe toutefois une hétérogénéité importante entre les différents pays de la zone euro.

Deuxièmement, les conditions financières dans la zone euro semblent afficher une forte corrélation (0,89) avec le cycle financier mondial. Les pays de la zone euro présentent toutefois des sensibilités diverses par rapport au cycle mondial.

Une corrélation entre cette sensibilité au cycle mondial selon les pays et différents déterminants, en ce compris l’ampleur et la composition de la position financière extérieure. Un élément majeur qui en ressort est que cette sensibilité semble dépendre de manière essentielle de l’ampleur de la position extérieure nette. Les pays affichant des engagements nets semblent réagir deux fois plus vivement que ceux présentant des actifs nets. Parmi les pays ayant des engagements nets, ceux qui se financent eux-mêmes au moyen d’autres investissements (principalement par endettement bancaire) s’avèrent particulièrement vulnérables au profil en dents de scie du cycle financier mondial.

Ces résultats obtenus ont plusieurs implications importantes en matière de politique. Tout d’abord, il s’avère utile pour la politique macroprudentielle de surveiller ce cycle financier mondial et/ou de contribuer à traiter l’extrême sensibilité à son profil en dents de scie. Deuxièmement, la forte corrélation entre les conditions financières dans la zone euro et le cycle financier mondial tend à confirmer un « dilemme financier » pour la zone euro, en s’inspirant de Rey (2015) pour les économies émergentes. Pareil dilemme implique qu’une fois que le compte financier est ouvert, les conditions monétaires sont influencées principalement par des facteurs mondiaux et dans une moindre mesure par une politique monétaire indépendante. Il est montré que ce dilemme dans la zone euro est particulièrement présent lorsque des pays affichent une position extérieure négative.

Dans le même temps, ces résultats montrent la nécessité d’une coordination entre les politiques macroéconomique (structurelle), macroprudentielle et monétaire pour que celles-ci atteignent leurs objectifs. Traiter la question de la position extérieure nette négative et, plus globalement, garantir la soutenabilité de la dette, comme cela se fait actuellement dans le cadre de la Procédure européenne concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM), aideraient vraisemblablement à protéger les pays durant les périodes d’appétence/d’aversion pour le risque des systèmes internationaux, contribuant ainsi également à des objectifs de stabilité financière et à des conditions monétaires indépendantes dans la zone euro.