Projections économiques pour la Belgique – Automne 2022

Article publié dans la Revue économique de 2022

L’économie belge ne se contracterait que temporairement et l’inflation devrait continuer de baisser progressivement

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Eindjaar2022

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Digest

Selon les projections d’automne de la Banque nationale de Belgique (BNB), l’économie belge se contracterait temporairement au dernier trimestre de 2022 dans le sillage de la crise énergétique. L’activité résiste toutefois et la croissance économique redeviendrait positive à partir de 2023, à mesure que l’inflation se tempère. Durant l’année écoulée, celle-ci s’est montrée persistante et s’est renforcée plus que prévu, dépassant les 13 % en octobre, principalement en raison de la hausse marquée des prix du gaz. En novembre, l’inflation a baissé sensiblement pour la première fois et la pression sur les prix continuerait de s’atténuer graduellement, compte tenu, entre autres, des attentes du marché concernant les cours internationaux de l’énergie. L’incertitude demeure cependant plus élevée qu’à l’accoutumée. Par le jeu des mécanismes d'indexation, les prix élevés font également grimper les coûts salariaux, qui progresseraient de près de 20 % d’ici 2025. Cette augmentation sans précédent des coûts salariaux constitue une menace pour la compétitivité-coût de l’économie belge. Enfin, le déficit budgétaire augmentera à nouveau à partir de 2023 et resterait élevé au cours des années suivantes. À politique inchangée, il avoisinerait toujours les 5 % du PIB en 2025. La dette publique se situe quant à elle sur une trajectoire ascendante.

L'économie belge a enregistré des résultats meilleurs que prévu au cours des neuf premiers mois de 2022, avec une croissance nette tant de l'activité que de l’emploi. Si les indicateurs de confiance se sont largement effondrés, d'autres indicateurs à court terme, tels que la production industrielle et les ventes au détail, ne laissent toutefois pas présager d’une récession manifeste. Une contraction limitée de l’économie serait cependant observée au dernier trimestre de 2022. La croissance économique repartirait progressivement à la hausse en 2023, à mesure que l’inflation se tempère.

Globalement, l’activité économique progresserait de 3,1 % en 2022 sur une base annuelle, après la forte expansion de plus de 6 % enregistrée en 2021. Le rythme de croissance se réduirait toutefois provisoirement en 2023, retombant à 0,6 %, avant de remonter à 1,7 % en 2024 et à 1,8 % en 2025. Les chiffres annuels sont toutefois quelque peu biaisés par des effets dits de débordement, la croissance ralentissant surtout à la fin de 2022 avant de se redresser déjà dans le courant de 2023.

La hausse marquée des prix (de l’énergie) touche tant le pouvoir d’achat des ménages que la confiance des consommateurs, ce qui pèse sur la consommation des ménages à court terme. À moyen terme, la consommation redeviendrait toutefois le principal moteur de la croissance. Le comportement d’épargne se normaliserait et le pouvoir d’achat ne serait progressivement plus porté par la seule création d’emplois supplémentaires, mais le serait aussi à nouveau par les salaires réels, à mesure que les mécanismes d’indexation feront effet. Après s’être contracté en 2022, le pouvoir d’achat par habitant augmenterait de plus de 5 % au cours de la période comprise entre 2023 et 2025.

Les entreprises continueront probablement de se montrer prudentes plus longtemps encore en matière d’investissements : il faudrait ainsi attendre la mi-2023 pour voir les investissements des entreprises renouer avec une croissance positive. La forte poussée des coûts salariaux les place face à des défis de taille sur les fronts de la rentabilité et de la compétitivité-coûts. Nous nous attendons à ce qu’elles misent davantage sur l’automatisation et la numérisation à long terme.

Le marché du travail est lui aussi demeuré vigoureux en 2022, puisque plus de 100 000 emplois supplémentaires ont été créés. Cependant, la création d’emplois ralentirait de façon temporaire, avant de reprendre dès le second semestre de 2023.

L’inflation est demeurée persistante, dépassant 13 % en octobre, sous l’effet principalement d’une nouvelle hausse des prix de l’énergie (déjà élevés). Elle a toutefois nettement reculé en novembre. Les marchés internationaux anticipent actuellement une modération progressive des prix de l’énergie. L’inflation régresserait de ce fait petit à petit pour revenir sous la barre des 2 % à partir de l’automne 2023. Au vu de la pression des coûts encore présente, l’inflation sous-jacente demeurerait quant à elle vive sur un plus long laps de temps, n’atteignant son pic qu’au premier semestre de 2023.

Par le jeu des mécanismes d’indexation, l’inflation marquée fait à son tour sensiblement grimper les coûts salariaux, qui progresseraient de pas moins de 20 % d’ici 2025. Cela constitue une menace pour la compétitivité‑coûts et pour la prospérité future, en particulier si la croissance des salaires dans les pays voisins demeurait en retrait au fil du temps. Bien que la forte croissance des salaires puisse exercer une pression supplémentaire sur les prix, les présentes projections supposent que les entreprises ne répercuteront pas l’intégralité de l’alourdissement de leurs coûts sur leurs prix, mais qu’elles l’absorberont une partie dans leurs marges bénéficiaires, comme elles l’ont déjà fait dans le passé pendant des périodes de forte hausse des salaires.

Naturellement, les projections d’inflation et celles des salaires restent entachées d’une grande incertitude. Si les prix de l’énergie repartaient à la hausse ou si les entreprises parvenaient à répercuter sur leurs prix une part plus importante de leurs coûts qu’en temps normal, l’inflation élevée se poursuivrait sur une plus longue période. L’article intègre également une analyse de sensibilité à cet égard.

Pointant à 4,3 % du PIB, le déficit budgétaire afficherait en 2022 un niveau légèrement plus faible qu’escompté, grâce à la croissance relativement forte cette année. Dès 2023, il se creuserait à nouveau et, à politique inchangée, avoisinerait toujours 5 % du PIB en 2025. À ce moment-là, la crise du coronavirus et celle des coûts ne seront bien évidemment plus en cause. La situation budgétaire est d’autant plus inquiétante que le ratio d’endettement se situe sur une trajectoire ascendante. Dans un contexte de montée des taux du marché, cette perspective n’est pas de bon augure.