Les déterminants de la participation au marché du travail en Belgique

La Belgique est une économie développée dont la création de richesse, en termes de produit intérieur brut, repose principalement sur un nombre relativement réduit de personnes très productives. Cependant, les gains de productivité stagnent alors que le taux de dépendance ne cesse de croître.

Augmenter le taux d’activité de la population en âge de travailler doit permettre à l’économie d’exploiter tout son potentiel de croissance, de diminuer la pression sur les comptes des pouvoirs publics, et ainsi d’améliorer la soutenabilité du système de sécurité sociale. Enfin, une plus grande participation au marché du travail va aussi dans le sens de l’équité car elle assure une meilleure intégration sociale, de même qu’elle permet de lutter contre la pauvreté en offrant à chacun la possibilité de contribuer selon ses capacités au bien-être général.

Le taux d'activité est plus faible en Belgique qu’en moyenne dans les trois pays voisins pour la quasi-totalité des tranches d'âge de la population des 15 à 64 ans. Les écarts les plus importants se situent dans le groupe des 15‑24 ans et dans celui des 55‑64 ans. La Flandre est la seule région où le taux d’activité de la population âgée de 25 à 54 ans soutient la comparaison avec les trois pays voisins. La plus faible activité dans le groupe des jeunes en Belgique comparativement aux pays de référence est due au fait que le cumul des études et du travail y est moins répandu. Pour le groupe des 55‑64 ans, la situation s'est améliorée au cours des vingt dernières années, surtout grâce à l’aménagement des réglementations régissant la fin de carrière, qui a pris en compte que les personnes entrent en moyenne plus tard sur le marché du travail, alors que l'espérance de vie a continuellement progressé. Néanmoins, l'âge de départ effectif à la pension en Belgique reste en 2018 moins élevé qu'en Allemagne, qu’en France ou qu’aux Pays-Bas.

Pour la population des 25 à 54 ans, les déterminants de la décision de participer au marché du travail ont été examinés séparément pour les hommes et pour les femmes. Dans les deux groupes, le niveau d’éducation est le principal facteur. La probabilité d’être actif chute de plus de 15 points de pourcentage pour les personnes ayant au plus un diplôme du secondaire inférieur par rapport à celles qui sont moyennement éduquées. L’écart entre les personnes ayant obtenu un diplôme du supérieur et celles moyennement éduquées est de 4 points pour les hommes, tandis qu’il atteint plus du double pour les femmes (9 points).

Les tâches liées à l’éducation des enfants restent encore dans la toute grande majorité des cas supportées par les femmes. Pour celles-ci, le fait d’avoir des enfants de moins de six ans diminue de manière marquée la probabilité de participer au marché du travail ; l’amplitude de cet effet s’amoindrit en fonction de l’âge des enfants, mais celui-ci reste toujours significativement négatif. En revanche, pour les hommes, les effets liés à la charge de famille sont très limités et ne sont pas significatifs, même avec des enfants en bas âge.

Enfin, être né dans un pays ne faisant pas partie de l’UE28 contribue à ce que le taux d’activité soit plus réduit : l’impact négatif est de 5 points de pourcentage pour les hommes et de plus de 15 points pour les femmes. Les femmes faiblement éduquées, d’origine étrangère hors UE et ayant une charge de famille, cumulent par conséquent les risques de ne pas participer au marché du travail.

L’article porte une attention particulière à l’estimation de la réserve de main-d'œuvre encore disponible : ce concept reprend, outre les chômeurs, les inactifs dont le profil est proche de celui des demandeurs d'emploi. Il comprend également les travailleurs à temps partiel qui désirent travailler davantage. Cet indicateur est particulièrement pertinent lorsque le taux de chômage est bas, afin d’avoir une vue plus complète sur les forces de travail mobilisables.

Parmi les 25‑54 ans, les inactifs cherchant activement un travail représentent 46 000 personnes, et les inactifs disponibles mais ne cherchant pas d'emploi environ 69 000. Ce dernier groupe a en général un lien plus ténu avec le marché du travail, notamment parce que les individus sont plus âgés, ont eu une scolarité courte, ou encore sont malades ou handicapés. Enfin, 3,6 % des travailleurs à temps partiel (surtout des femmes) déclarent vouloir travailler quelque 13 heures de plus par semaine. Exprimés en emplois à durée moyenne, ces travailleurs à temps partiel sous-employés représentent l’équivalent de 45 000 emplois potentiels supplémentaires pour l'ensemble du pays s’ils passaient à temps plein.

L'écart observé entre les régions pour les taux de chômage ne s'atténue pas si on élargit le concept à celui de réserve de main-d'œuvre: comme les chômeurs, les inactifs mobilisables et les travailleurs à temps partiel désireux de travailler davantage sont relativement plus nombreux à Bruxelles et en Wallonie qu'en Flandre. Il apparaît donc important pour les régions que la Flandre puisse puiser dans les réserves des deux autres régions, même si les freins (compétences linguistiques, coûts liés à la mobilité) ne doivent pas être sous-estimés.

L'article montre aussi que la décision d’être actif dépend aussi des opportunités d’emploi au niveau local. Tant pour les hommes que pour les femmes, la probabilité d’être actif diminue si le taux de chômage de la région est élevé. Des mesures visant à éviter une augmentation du chômage suite à un choc temporaire, même sévère tel celui que nous traversons actuellement, permettent ainsi d'empêcher que le taux d'activité ne recule, et donc de limiter les conséquences à long terme de la crise.