La Banque nationale maintient le coussin de fonds propres contracyclique pour les établissements financiers à 0 %.

La Banque nationale de Belgique (BNB) a décidé, en date du 17 mai 2022, de maintenir le taux de coussin de fonds propres contracyclique à 0 % pour le troisième trimestre de 2022. Les établissements financiers belges ne doivent dès lors pas constituer de coussins supplémentaires pour les risques liés aux crédits qu'ils octroient à l’économie réelle en Belgique.

Afin de gérer la procyclicité dans le système financier, les autorités prudentielles ont à leur disposition un outil efficace : le coussin de fonds propres contracyclique. Il s’agit d’un coussin temporaire constitué dans la phase ascendante du cycle de crédit afin de garantir que les banques disposent d’une marge de manœuvre suffisante pour couvrir les pertes de crédit dans la phase descendante du cycle de crédit. Cela contribue également à maintenir l’offre de crédit à l’économie et à atténuer le fléchissement du cycle financier.

La BNB prend chaque trimestre une décision sur ce point, sur la base de ses compétences définies dans la loi bancaire de 2014.

Analyse

En mars 2020, au début de la pandémie, la BNB a libéré ce coussin de fonds propres macroprudentiel qui se montait à environ 1 milliard d'euros, afin de donner aux banques belges une marge de manœuvre supplémentaire pour 1) reconnaître à temps et de manière conservatrice les pertes de crédit potentielles, 2) augmenter les prêts au secteur privé, et 3) financer des moratoires et autres solutions de restructuration de dette pour les emprunteurs viables faisant face à des problèmes temporaires ou plus structurels de remboursement de prêts bancaires.

Au début de 2022, la nécessité d'un tel soutien visant à aider les banques à remplir leur rôle critique en cas de crise économique s’était sensiblement réduite, dans la mesure où la reprise économique après la pandémie s’était accélérée et que les indicateurs de qualité des actifs continuaient à s’améliorer. À cette époque, les indicateurs de croissance du crédit en termes nominaux affichaient également un regain de dynamisme comparable à la situation observée en 2019, lorsque l’activation du coussin de fonds propres contracyclique avait été annoncée pour la première fois en Belgique. Avant le début du conflit militaire en Ukraine à la fin de février 2022, les conditions macro-financières semblaient dès lors suggérer la nécessité d’envisager une réactivation du coussin de fonds propres contracyclique.

Toutefois, depuis la guerre, les prix très élevés de l’énergie et des matières premières, la hausse des taux d'intérêt et la volatilité importante sur les marchés financiers ont engendré de nombreuses incertitudes concernant les évolutions macro-financières. Afin d’identifier l’orientation de la politique macroprudentielle la plus appropriée possible, la BNB suit et analyse les répercussions de ces facteurs sur le niveau des risques cycliques et sur la probabilité de scénarios de risque extrême pour la stabilité financière. Parallèlement, les provisions pour risque de crédit constituées par les banques pour le premier trimestre de 2022 indiquent que les établissements de crédit belges sont très optimistes quant aux pertes de crédit potentielles qu’ils pourraient subir au cours des prochains trimestres sous l’effet des évolutions les plus récentes. Par ailleurs, les indicateurs de la qualité des actifs disponibles ne signalent pas (encore) d'accentuation de l’incidence des problèmes de remboursement de prêts.

La réactivation du coussin de fonds propres contracyclique est envisagée en septembre

Si l’on s’attend à ce que l’incertitude reste élevée au cours des prochains mois, davantage de données et d’informations seront disponibles en septembre en ce qui concerne l’incidence des évolutions liées à la guerre (1) sur le cycle financier et le dynamisme du crédit bancaire accordé aux ménages et aux sociétés non financières belges et (2) sur le risque de crédit que présentent les prêts octroyés par les banques belges à ces contreparties. En l’absence de signes dénotant clairement une incidence significative de la guerre en Ukraine (1) sur le cycle financier et le dynamisme des prêts bancaires aux ménages et aux sociétés non financières ou (2) la qualité de crédit des prêts à ces contreparties, la BNB estime qu’une réactivation du coussin de fonds propres contracyclique sera alors entièrement justifiée pour veiller à ce que les banques belges disposent de la résilience nécessaire en vue d'assurer leurs fonctions clés pour l'économie réelle et de soutenir les emprunteurs connaissant des difficultés de remboursement de prêts dans l’éventualité d’un futur scénario de croissance économique défavorable et/ou d’une correction sur le marché immobilier belge.

Dans le cas d’une réactivation en septembre, le taux de coussin contracyclique serait fixé à 0,5 %. La période de mise en œuvre pour les banques serait toutefois ramenée à six mois (au lieu de la durée normale de douze mois), une possibilité explicitement prévue dans la directive européenne sur les exigences de fonds propres (« Capital Requirements Directive ») en cas de « circonstances exceptionnelles ». Cela signifie que, dans le cas d’une réactivation, le coussin de fonds propres contracyclique devra être constitué par les banques au 1er avril 2023. Comme les banques belges affichent des positions de solvabilité solides et disposent d’une large marge de manœuvre en fonds propres et d’une bonne rentabilité, elles peuvent se conformer à ce relèvement des exigences de fonds propres au niveau macroprudentiel sans devoir modifier leur politique de crédit pour les ménages et les sociétés non financières belges. Si nécessaire, la BNB peut évidemment décider à tout moment de libérer à nouveau ce coussin de fonds propres contracyclique, comme ce fut le cas au début de la pandémie.