Communiqué de presse - Régulation et concurrence dans le secteur de la distribution en Belgique

Article publié dans la Revue économique de septembre 2009

Le secteur de la distribution constitue un maillon essentiel de l'économie, d'une part, en raison de son poids en termes de valeur ajoutée ou d'emploi, et, d'autre part, parce qu'il influence directement le bien-être du consommateur par la diversité des biens proposés et par le niveau de leur prix.

Le fonctionnement du secteur de la distribution fait régulièrement l'objet de l'attention des institutions internationales lors de l'examen de la position structurelle de la Belgique. Or l'évolution récente de l'activité et de la productivité dans ce secteur apparaît en retrait de celle observée dans les pays plus dynamiques d'Europe ou aux États-Unis. Ces développements signaleraient un niveau insuffisant de concurrence, lié un à un cadre réglementaire trop contraignant, ce qui pourrait donner lieu à des inefficiences et en particulier un niveau de prix trop élevé. Le présent article vise à objectiver ces constatations, en croisant les différentes sources d'information disponibles.

Selon les résultats des indicateurs établis à des fins de comparaison internationale, tels ceux de l'OCDE, il apparaît que la réglementation encadrant le secteur de la distribution est abondante et relativement restrictive en Belgique. Ce constat est d'ailleurs confirmé par l'examen des dispositions en vigueur. Les conditions opérationnelles le caractère national des limitations des jours et heures d'ouverture des (grands) magasins et les monopoles de distribution de certains produits, notamment les médicaments sont soumises à une législation particulièrement abondante en Belgique. Elles constituent un frein plus important que les conditions d'accès au marché ou la réglementation directe des prix.

En matière de performances économiques, le commerce conserve cependant en Belgique un niveau de la productivité supérieur à celui de la plupart des autres pays européens et même à celui des États-Unis. Toutefois, contrairement à ce que l’on observe dans d'autres branches, cette position favorable s'est érodée au cours des dix dernières années. Il apparaît que la difficulté principale de la Belgique réside dans son incapacité à améliorer l'efficacité des facteurs de production. Ceux ci sont pourtant abondants, comme en témoigne l'intensité capitalistique élevée, et de haute qualité, notamment par le niveau de qualification de la main d'œuvre. La faiblesse des gains de productivité pourrait peser sur la compétitivité globale du secteur de la distribution en Belgique et, associée à la plus grande ouverture internationale que pourrait induire la transposition de la directive Services à la fin de l'année 2009, peser sur son développement.

Par rapport à la situation des pays proches, on ne constate pas d'anomalies frappantes en matière de concurrence en Belgique. En ce qui concerne sa structure, le commerce de détail alimentaire non spécialisé est caractérisé par un nombre croissant de grands magasins et de hard discounters alors que les produits de marques génériques occupent une part de marché importante. Par ailleurs, malgré des indicateurs globaux indiquant une certaine concentration au niveau national, la concurrence locale - évaluée par une approche originale appliquée sur des données détaillées d'implantations - semble relativement forte. Ceci s'explique sans doute essentiellement par une forte densité de population, qui crée des marchés locaux suffisamment profonds pour accepter plusieurs concurrents.

En ce qui concerne le niveau des prix, les comparaisons internationales indiquent que les prix pratiqués par le secteur du commerce de détail sont plus élevés en Belgique que dans la zone euro et dans les trois pays voisins. On observe également une dégradation récente du différentiel des prix pratiqués dans les grandes surfaces en Belgique, en particulier par rapport aux prix pratiqués par les grandes surfaces allemandes et néerlandaises. L'évolution défavorable du coût salarial en Belgique, de même qu'un niveau plus élevé de mark-up, peut contribuer à expliquer l'évolution du différentiel de prix par rapport à l'Allemagne. La forte dégradation du différentiel des prix relevés dans les grandes surfaces entre la Belgique et les Pays-Bas s'explique en revanche par la guerre de prix qui a fait rage entre grands distributeurs néerlandais, d'octobre 2003 à décembre 2006.

Au total, il apparaît que l'influence réelle des réglementations spécifiques relatives au commerce sur l'efficience du secteur, sur le degré de concurrence et, in fine, sur le niveau des prix à la consommation doit être appréciée de manière nuancée. D'une part, une coordination et une simplification des nombreuses dispositions existantes permettrait sans doute d'obtenir les mêmes résultats en matière de protection des consommateurs, d'aménagement du territoire, ou d'autres objectifs sociétaux, tout en réduisant les barrières implicites à l'entrée de nouveaux acteurs qu'occasionne la multiplication des textes réglementaires. D'autre part, les performances du secteur de la distribution sont également influencées par les caractéristiques et les règles d'organisation générales de l'économie, en particulier, le fonctionnement général des marchés des produits et du travail ou l'esprit d'entreprise. Par ailleurs, la taille du marché, limite certainement les possibilités d'exploitation d'économies d'échelles, en particulier dans un marché européen qui demeure segmenté.