Communiqué de presse - Quels enseignements tirer du modèle américain pour le projet institutionnel de l’UEM?

Article publié dans la Revue économique de septembre 2014

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Article: Quels enseignements tirer du modèle américain pour le projet institutionnel de l’UEM?

L’article compare la zone euro avec les États-Unis afin de tirer des leçons en vue de l'achèvement de l’Union économique et monétaire. Les États-Unis répondent mieux, quoiqu’imparfaitement, aux critères de la théorie des zones monétaires optimales et n’ont pas connu la crise de la dette qui a touché la zone euro, notamment parce qu’ils disposent d’institutions fédérales qui n’ont guère leur équivalent dans l’UE.

La stabilité de la zone euro s’améliorerait si les États membres respectaient mieux les critères d’une zone monétaire optimale, laquelle requiert une flexibilité accrue des marchés de produits et du travail, ainsi qu’un renforcement de la mobilité régionale du travail. La consolidation du marché unique peut aussi y contribuer et accroître encore les bienfaits de la monnaie unique grâce à une intensification des échanges commerciaux. Par ailleurs, il s’agit de prévenir les déséquilibres économiques qui peuvent générer des effets de propagation aux autres États membres. En l’absence d’une politique économique fédérale à l’instar de celle des États-Unis, il importe que les règles existantes en matière de coordination des politiques économiques nationales, qui sont traduites chaque année par la Commission et le Conseil dans les recommandations spécifiques aux pays dans le cadre du Semestre européen, soient effectivement mises en pratique.

Il est essentiel d’éviter toute répétition du retournement soudain des flux de capitaux qui s’est produit en 2010. Cela suppose une Union bancaire comme aux États-Unis. De grands progrès ont été réalisés à cet égard avec le Mécanisme de surveillance unique et l’évaluation complète des banques qui en relèvent, et avec la mise sur pied du Mécanisme de résolution unique. Le Mécanisme de résolution doit être complété par la mise en œuvre d’un soutien budgétaire. Le troisième pilier de l’union bancaire, à savoir un Système commun de garantie des dépôts, peut, lui aussi, contribuer à éviter des chocs financiers négatifs dans la zone euro. L’élaboration d’alternatives au financement bancaire de l’économie par la création d’une Union des capitaux reste une étape nécessaire pour que le partage des risques entre États membres passe davantage par les marchés financiers, ce qui réduira la nécessité de transferts budgétaires.

Pour ce qui est de la part restante et nécessaire de partage des risques, les États-Unis connaissent un vaste système de mutualisation de la dette et disposent d’un budget fédéral qui contribue à absorber les chocs économiques. C’est toutefois l’aboutissement de deux siècles d’intégration politique. La zone euro a directement mis en œuvre, avec succès, sa politique monétaire commune, mais l’on ne peut pas s’attendre à ce que les 18 États-nations de la zone euro engrangent, dans un laps de temps relativement court, des avancées suffisantes pour réaliser une union politique, assurément nécessaire pour l’émission d’une dette commune et pour un accord sur un budget significatif pour la zone euro, ou tout autre mécanisme budgétaire d’absorption des chocs.

L’émission de dette commune constitue la panacée pour plus d’une maladie de la zone euro, et élargirait l’éventail d’instruments de politique monétaire, mais, tout comme les transferts, elle entraîne un problème d’aléa moral. Aussi longtemps que ces problèmes ne sont pas résolus de manière convaincante, l’on peut s’attendre à ce que ces mécanismes demeurent politiquement tabous. Les unions monétaires disposent d’un budget central parce que ce sont également des unions politiques; la zone euro constitue une exception à cette règle historique. Elle est capable de survivre sans budget fédéral: les marges que contiennent les règles budgétaires européennes permettent, pour autant qu’on les respecte, d’absorber les chocs économiques par le jeu des budgets nationaux, chose à laquelle contribuera largement une union bancaire et des capitaux qui fonctionne correctement.