Communiqué de presse - L’endettement des ménages: évolution et répartition

En utilisant les statistiques tant macroéconomiques (comptes financiers nationaux) que microéconomiques (Enquête sur le financement et la consommation des ménages - HFCS et Centrale des crédits aux particuliers), cet article traite en profondeur de l’évolution et de la répartition de l’endettement des ménages belges par rapport à la zone euro. Une attention particulière est accordée à l’identification de certains groupes de ménages présentant un endettement problématique, et ce sur la base de différents ratios portant, d’une part, sur la liquidité: endettement rapporté au revenu (debt-to-income ratio), montants périodiques à rembourser rapportés au revenu (debt-service-to-income ratio) et, d’autre part, sur la solvabilité: endettement rapporté à l’actif (debt-to-asset ratio).

Les statistiques macroéconomiques font état d’une situation plutôt favorable de l’endettement des ménages belges par rapport à la zone euro. Ainsi, le taux d’endettement des ménages belges (56,5 % du PIB) enregistré début 2014 était inférieur à celui de la zone euro (63,7 % du PIB). Les différents ratios d’endettement se situent en moyenne en deçà du niveau de la zone euro. C’est le cas en particulier des ratios de solvabilité, en raison des actifs considérables dont disposent les ménages belges. Néanmoins, les dettes des ménages belges ont sensiblement augmenté ces dix dernières années: en termes nominaux, ces dettes ont doublé pour s’établir à 217 milliards d’euros au début de l’année 2014, et le taux d’endettement a grimpé de 40 à 56,5 % du PIB, ce qui a réduit l’écart avec la zone euro.

Les données microéconomiques montrent néanmoins que parmi les emprunteurs se trouvent des groupes dont l’endettement rapporté au revenu est fragile, et ce dans une mesure comparable avec la zone euro. La part des ménages affichant un debt-to-income ratio supérieur à 3 atteint respectivement en Belgique et dans la zone euro 15 et 16 % des ménages qui ont des dettes. La part des ménages présentant un debt-service-to-income ratio supérieur à 0,4 représente, tant en Belgique que dans la zone euro, 8 % des ménages endettés. Les données de la HFCS font en outre apparaître que ce sont principalement les jeunes ménages et les ménages disposant d’un revenu plus faible qui font face à des dettes relativement élevées par rapport à leur revenu. Ainsi, plus d’un tiers des ménages endettés du quintile de revenu le plus faible ont un debt-service-to-income ratio de plus de 0,4: ils consacrent plus de 40 % de leur revenu au remboursement de dettes. Néanmoins, ces groupes participent relativement peu au marché du crédit, et leurs dettes éventuelles sont souvent de petits emprunts, si bien que cela n’a pas nécessairement de conséquences macroéconomiques ou prudentielles importantes.

En ce qui concerne les ménages qui ont un crédit hypothécaire, ceux qui présentent les taux d’endettement les plus élevés par rapport à leur revenu se trouvent parmi les groupes les plus jeunes disposant d’un revenu modeste. La plupart de ces ménages n’ont toutefois pas un ratio excessif de la dette à l’actif. Chez les ménages qui ont au moins un crédit non hypothécaire, ce sont à nouveau les ménages plus jeunes disposant d’un revenu plus faible qui présentent souvent des ratios (trop) élevés d’endettement rapporté au revenu. En outre, pour bon nombre de ces ménages, les dettes ne sont pas suffisamment couvertes par des actifs. Le risque de défaut de paiement est donc le plus élevé parmi les ménages appartenant à ce groupe, a fortiori s’ils devaient être confrontés à un choc de revenu négatif.

La soutenabilité de l’endettement des ménages est relativement plus sensible aux chocs de revenu en Belgique que dans la zone euro. Cela s’explique notamment par le fait que certains groupes présentent déjà des ratios d’endettement rapporté au revenu relativement élevés et que ce sont principalement les jeunes qui affichent un endettement important. Les jeunes n’ont généralement pas encore constitué suffisamment d’actifs qu’ils pourraient réaliser s’ils devaient faire face à un choc de revenu négatif.

Les données de la Centrale des crédits aux particuliers confirment que les jeunes sont relativement plus fréquemment confrontés à des arriérés de remboursement. L’on observe également chez ce groupe un lien plus étroit entre le défaut de paiement et l’évolution du chômage, ce qui illustre leur sensibilité à des chocs de revenu. La sensibilité des jeunes au revenu se manifeste surtout en matière de crédit à la consommation. L’importance du revenu et du marché du travail ressort par ailleurs aussi de la forte corrélation (positive) entre les retards de paiement agrégés et l’évolution du chômage. Ainsi, la hausse des retards de paiement constatée depuis la crise suit assez précisément, avec un décalage de quelques mois, l’augmentation du chômage.