Communiqué de presse - Évolutions récentes de la situation financière des entreprises et des liens de participation

Article publié dans la revue économique de décembre

Chaque année, dans la Revue économique de décembre, la Banque présente les évolutions qui ressortent des comptes annuels des sociétés non financières relatifs à l'année précédente, au départ d'un échantillon représentatif des comptes annuels disponibles en septembre. Cette année, l’analyse a été singulièrement compliquée par la transposition en droit belge de la directive européenne 2013/34/UE relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d’entreprises. Parmi les principaux changements qui en découlent, on peut citer par exemple la refonte des notions de grande et de petite entreprise au sens du Code des sociétés et la création de la microsociété, la modification du contenu des comptes annuels et la réforme du traitement comptable de certaines rubriques, parmi lesquelles les frais de recherche et les résultats exceptionnels. Applicables aux exercices comptables débutant après le 31 décembre 2015, ces nouveautés créent une rupture de série inédite dans les données de la Centrale des bilans.

Certains enseignements généraux peuvent toutefois être tirés des comptes annuels relatifs à 2016. Si on neutralise l’impact du changement du mode d’amortissement des frais de recherche, ainsi que certaines opérations ponctuelles de multinationales sans incidence sur l’activité économique réelle, la croissance du résultat d’exploitation agrégé a été très stable en 2016, en termes tant bruts que nets. Cette stabilité reflète un contexte conjoncturel combinant, d’une part, une croissance modérée de l’activité et, d’autre part, une évolution favorable des principaux coûts supportés par les entreprises (notamment les salaires et les achats de matières premières). Dans l’ensemble, la rentabilité est elle aussi demeurée assez stable en 2016: si la plupart des ratios de rentabilité ont légèrement progressé en termes globalisés, les ratios médians n’ont guère révélé d’amélioration.

En ce qui concerne la solvabilité, les dernières années ont surtout été marquées par un net relèvement des ratios médians des PME. Ce mouvement de fond a manifestement été causé par les modifications apportées au traitement fiscal des bonis de liquidation, qui ont incité les petites entreprises à conserver les bénéfices taxés en leur sein, d’abord sous la forme de capital social, ensuite sous la forme de réserves spécifiques, dites « de liquidation ». Si les principales mesures de solvabilité reflètent une amélioration régulière, il ne faut pas perdre de vue que 17 % des entreprises examinées sont dans une situation de capitaux propres négatifs, ce qui constitue un clignotant financier considérable. Les statistiques de faillites témoignent d’ailleurs d’un possible regain de vulnérabilité des entreprises au cours des derniers mois: après trois années de recul, le nombre de faillites est reparti à la hausse à partir du troisième trimestre de 2016.

Suivant la tendance observée depuis l’éclatement de la crise financière, les charges d’intérêts se sont à nouveau allégées en 2016, dans un contexte de politique monétaire toujours très accommodante. Combinée au degré élevé d’utilisation des capacités de production et à l’importance des réserves de trésorerie, la persistance de taux d’intérêt faibles est de nature à favoriser les efforts d’investissement des entreprises. À cet égard, il apparaît que le taux médian de renouvellement des immobilisations corporelles, bien que toujours significativement inférieur aux niveaux en vigueur avant la récession de 2008-2009, tend à se redresser depuis plusieurs années.

La dernière partie de l’article propose un éclairage original sur un aspect particulier des relations interentreprises: les liens de participation déclarés par les entreprises dans l’annexe de leurs comptes annuels. Parmi les principales conclusions tirées de cette analyse, on relève que les liens de participation sont généralement étroits: dans près de deux tiers des cas, il s’agit de participations majoritaires, avec des taux de participation souvent largement supérieurs à 50 %. On remarque également une intensification des relations de groupe au cours des 20 dernières années, qui reflète une tendance générale à la multiplication des structures juridiques, les entreprises étant devenues plus enclines à créer des sociétés distinctes par fonction ou par activité. Cette évolution a concerné toutes les branches d’activité, mais elle a été tout particulièrement alimentée par de nombreuses créations de sociétés dans des domaines qui, par nature, sont propices aux liens de participation, comme les sociétés dites « de management », les sièges sociaux et les holdings. Les sociétés de ces branches occupent généralement un petit nombre de travailleurs et génèrent relativement peu de valeur ajoutée car elles répondent le plus souvent à des considérations d’ordre juridique, financier ou fiscal. Les sociétés actives dans les branches traditionnelles de l’économie belge (l’industrie, le commerce ou la construction, par exemple) et qui ont des liens de participation occupent en revanche nettement plus de personnel. Il convient de noter que les comptes annuels de nombreuses grandes entreprises commerciales ou industrielles présentent aujourd’hui un caractère hybride avec, d’une part, un actif principalement composé d’immobilisations financières et, d’autre part, un compte de résultats toujours largement déterminé par le résultat d’exploitation (et donc par les activités productives).

En combinant les données de départ déclarées par les entreprises, l’analyse a également permis de reconstituer des groupes de sociétés. Ce travail montre notamment que la grande majorité des sociétés ayant des liens de participation appartiennent à de très petits ensembles, alors qu’une minorité d’entreprises font partie de groupes de très grande ampleur. Enfin, les premiers résultats d’une étude sur la relation entre liens de participation et taux de faillite montrent que ce dernier est sensiblement plus faible pour les sociétés faisant partie d’un groupe et qu’il tend à baisser quand la taille du groupe augmente.