Communication macroprudentielle concernant les restrictions applicables à la distribution de bénéfices par les établissements financiers belges

« Les établissements financiers belges devraient s’abstenir de distribuer des bénéfices à tout le moins jusqu’au 30 septembre 2021, sauf moyennant le respect de conditions strictes et sous réserve que la distribution de bénéfices se limite à un niveau très prudent. »

Le Comité européen du risque systémique (European Systemic Risk Board - ESRB) a publié aujourd’hui une nouvelle recommandation (ESRB/2020/15) – modifiant la recommandation ESRB/2020/7 – concernant les restrictions applicables aux distributions de bénéfices par les établissements financiers européens pendant la pandémie de COVID-19. L’ESRB recommande aux autorités concernées de demander aux établissements financiers relevant de leur champ de surveillance de s’abstenir, à partir du 2 janvier 2021 et jusqu’au 30 septembre 2021, de procéder à des distributions de bénéfices sous la forme de dividendes, de rachats d’actions ou d’obligations de versement d’une rémunération variable à un preneur de risques significatif, ayant pour effet de réduire la quantité ou la qualité des fonds propres, à moins que les établissements financiers ne fassent preuve d’une extrême prudence dans la mise en œuvre de l’une de ces actions et que la réduction qui en résulte ne dépasse pas le seuil de prudence fixé par leur autorité compétente. Les autorités compétentes devraient calibrer leur seuil de prudence en tenant dûment compte de la nécessité pour les établissements financiers de maintenir un niveau de fonds propres suffisamment élevé. Elles doivent également veiller à ce que le niveau global des distributions des établissements financiers relevant de leur champ de surveillance soit significativement inférieur à celui des dernières années ayant précédé la crise du COVID‑19. Il est également recommandé aux autorités concernées d’appliquer, le cas échéant, cette recommandation aux établissements financiers au niveau sous-consolidé ou individuel.

Dans l’esprit de la recommandation précitée de l’ESRB, la BCE a publié le 15 décembre sa propre recommandation (BCE/2020/62) concernant les distributions de bénéfices par les établissements de crédit importants (significant institutions ‑ SI) pour la période courant jusqu’au 30 septembre 2021. Cette nouvelle recommandation remplace la recommandation existante (BCE/2020/35) qui demandait à ces banques de ne pas verser de dividendes (et de ne pas prendre d’engagement irrévocable de le faire) et de ne pas effectuer de rachats d’actions en vue de rémunérer leurs actionnaires jusqu’au 1er janvier 2021. La nouvelle recommandation demande aux établissements importants de ne pas distribuer de dividendes, ou de les limiter, jusqu’au 30 septembre 2021. Dans l’éventualité où des banques reprendraient les distributions de bénéfices, la BCE attend que le niveau des dividendes et des rachats d’actions reste inférieur à 15 % des bénéfices cumulés des exercices 2019 et 2020 et ne dépasse pas 20 points de base du ratio de fonds propres de base de catégorie 1 (Common Equity Tier 1 – CET1), le montant le plus bas devant être retenu. Les banques prévoyant de verser des dividendes ou d’effectuer des rachats d’actions doivent être rentables et afficher des trajectoires de fonds propres robustes. Elles devraient également prendre contact avec leur équipe de surveillance prudentielle conjointe (joint supervisory team) pour déterminer si le niveau de distribution qu’elles envisagent est prudent.

En sa qualité d’autorité de surveillance microprudentielle des établissements moins importants (less significant institutions ‑ LSI) belges, la BNB publiera bientôt une nouvelle communication étendant cette recommandation de la BCE (BCE/2020/62) aux banques belges soumises à son contrôle. Cette communication remplacera alors la communication actuelle de la BNB NBB_2020_33 du 30 juillet 2020.

En tant qu’autorité de surveillance microprudentielle des entreprises belges d'assurance et de réassurance, la BNB préparera également une nouvelle circulaire reprenant les éléments de la nouvelle recommandation de l’ESRB pour le secteur belge de l'assurance. La BNB prévoit de publier cette nouvelle circulaire au début de 2021. Celle-ci remplacera alors la circulaire existante NBB_2020_34 du 25 août 2020.

En tant qu’autorité macroprudentielle, la BNB estime justifiée la prolongation des contraintes existantes sur la distribution de dividendes et la rémunération variable. Elle partage l’avis de l’ESRB selon lequel les éventuelles distributions de bénéfices ne devraient être possibles que si elles sont limitées et conditionnées au respect d'une série de conditions et de seuils stricts quant au niveau prudent de la distribution envisagée et à l'incidence de la distribution sur la qualité et la quantité des fonds propres de l'établissement financier. En limitant les distributions de bénéfices (ou des opération équivalentes) jusqu'au 30 septembre 2021, le secteur financier préserve et renforce même sa capacité de résistance tout en garantissant l’égalité de traitement en son sein. Dans le contexte d'incertitudes toujours élevées (entourant notamment les évolutions en matière de pertes dans le secteur financier) et de risques de détérioration résiduels liés à la crise du COVID-19, la continuité de l'intermédiation financière et l'octroi de crédits à l'économie réelle dépendent de façon déterminante de la capacité du secteur financier d’absorber des pertes de crédit et des moins-values. À l’heure actuelle, il est essentiel de maintenir la quantité et la qualité des fonds propres des banques et des assureurs afin de préserver la capacité d'absorption des pertes du secteur financier. Ce dernier ne doit par ailleurs pas hésiter à utiliser les fonds propres disponibles de la manière la plus appropriée pour accomplir ses fonctions essentielles d’octroi de crédit et, plus généralement, d'intermédiation financière, y compris dans le cadre du processus de réaffectation des ressources lié aux changements structurels de l'économie. L’utilisation productive des fonds propres au sein du secteur financier est essentielle pour atténuer les éventuelles contractions contre-productives et procycliques du crédit et soutenir une reprise économique durable.

Comme elle l’a fait dans la communication similaire du 30 juillet 2020, la BNB, en sa qualité d’autorité macroprudentielle, approuve pleinement et inconditionnellement les mesures prises par les autorités microprudentielles concernées visant à mettre en œuvre la dernière recommandation en date de l’ESRB. La BNB rappelle que ces communications/recommandations des autorités microprudentielles doivent être appliquées par tous les établissements de crédit et toutes les entreprises d’assurance et de réassurance belges opérant sur le marché financier belge – qu’ils soient ou non filiales d’un groupe international[1]. L’application exhaustive de la recommandation de l’ESRB à l’ensemble des établissements financiers concernés est nécessaire afin de préserver la stabilité financière et d’assurer les fonctions d’intermédiation financière critiques en Belgique, tout en respectant l’égalité de traitement. La BNB exhorte dès lors l’ensemble des établissements de crédit et des entreprises d’assurance et de réassurance belges à appliquer strictement, jusqu’au 30 septembre 2021 au moins, la recommandation et les communications relatives aux distributions de bénéfices.

Cette communication se fonde sur le mandat macroprudentiel de la BNB tel que formalisé à l’article 36/42 de sa loi organique (loi du 22 février 1998), qui la charge de contribuer à la stabilité du système financier dans son ensemble, notamment en renforçant la robustesse du système financier et en prévenant la survenance de risques systémiques. Au-delà des communications, l’article 36/34 recense également les instruments macroprudentiels (en vigueur en droit national) dont dispose l’autorité macroprudentielle pour exercer son mandat.

[1] Cette communication s’applique donc à l’ensemble des établissements de crédit et entreprises d’assurance et de réassurance de droit belge opérant sur le marché financier belge.